Contexte et objectifs
Depuis l’adoption de la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD), de nombreux documents et guides d’explication ont été publiés par l’EFRAG*. Ces derniers sont une mine d’information pour bien comprendre les attendus de la directive mais ceux-ci sont souvent très techniques, en plus d’être en anglais. En publiant ce guide, l’objectif de l’ANC est de proposer une lecture facilitée des guides rédigés par l’EFRAG et ainsi contribuer à une mise en œuvre plus homogène de la CSRD en France.
Le guide de l’ANC est structuré par ESRS et sous forme de questions/réponses. Dans cet article, nous vous proposons un éclairage sur les questions de matérialité.
*L’EFRAG (European Financial Reporting Advisory Group) est une association internationale sans but lucratif créée en 2001 et qui agit en qualité de conseil auprès de la commission européenne, notamment en ce qui concerne la rédaction du texte de la CSRD.
Les étapes de la matérialité
L’analyse de double matérialité est le point de départ pour le reporting de durabilité demandé par la CSRD (et la stratégie RSE en général). Cette analyse a pour objectif d'identifier quels enjeux de durabilité sont significatifs ou “matériels” pour l’entreprise.
Pour se faire, on y étudiera à la fois l’impact des enjeux de durabilité sur l’entreprise mais également les impacts des activités de cette dernière sur l’environnement et la société.
Le Guide de l’ANC vient apporter des recommandations méthodologiques pour appréhender au mieux cet exercice incontournable. De manière générale, l’ANC rappelle qu’une approche mesurée et proportionnée est à privilégier, notamment pour les entreprises de plus petite taille.
Conseil n°1 : une approche en 3 étape
L’ANC propose de mener son analyse de la manière suivante :
- Comprendre le contexte de l’entreprise, ses activités, ses marchés, les réglementations auxquelles elle est soumise et qui sont ses parties prenantes.
- Dresser une liste des sujets de durabilité potentiels pour l’entreprise. Dans un premier temps, il est recommandé de partir de la synthèse proposée dans l’ESRS 1 AR16 et de compléter avec d’autres sources bibliographiques.
- Choisir les sujets les plus significatifs suite aux analyses de la matérialité d’impact et financière.
Conseil n°2 : considérer la chaîne de valeur
Le Guide rappelle également que l’analyse de matérialité et l’identification des enjeux doivent se faire sur l’ensemble de la chaîne de valeur en amont et en aval. L’analyse de risques et opportunités liées aux sujets de durabilité inclut alors les problématiques “fournisseurs” et “produit”, au même titre que les activités propres de l’entreprise.
Conseil n° 3 : analyser des enjeux bruts
Il est conseillé de ne pas prendre en compte les actions déjà mises en œuvre par l’entreprise lorsque l’entreprise examine ses risques et opportunités. C’est une analyse des enjeux “bruts” ou tels quels qui doit s’opérer. Les plans d’action pourront être valorisés lors de la rédaction du rapport.
Evaluation et seuils
Comment savoir si un enjeu est significatif ?
C’est là toute la question de l'analyse de matérialité qui va évaluer son importance au regard des impacts négatifs, impacts positifs, risques et opportunités éventuels.
La question des seuils quantitatifs peut alors se poser. Le Guide mentionne que l’utilisation de méthodes quantitatives peut être utile pour les grands groupes mais ce n’est pas obligatoire. L’objectif final est bien d’identifier la pertinence des enjeux et de ne pas se perdre dans des méthodologies trop complexes. A terme, de nombreuses activités économiques auront leurs enjeux matériels listés dans les normes sectorielles, actuellement en cours de développement.
Désagrégation
Que faire en cas de multiples activités et/ou secteurs géographiques au sein d’un groupe ? Le Guide précise que la matérialité doit s’apprécier d’un point de vue global. Pour autant, il convient de noter que certains enjeux propres à une activité ou entité qui ont des impacts très localisés (pollution par exemple) méritent d’être “remontés” au niveau groupe, s’ils sont suffisamment significatifs. Par ailleurs, on pourra se servir de la règle des “10% du CA” proposée par l’ESRS 2 pour qualifier un secteur significatif.
Des enjeux aux informations
Une fois la matérialité réalisée, on doit alors se demander quelles informations (ou datapoints) associées aux enjeux publier dans son rapport de durabilité.
L’objectif ici est de fournir des informations qui sont importantes pour la bonne compréhension d’un enjeu matériel et/ou qui permettent de répondre aux besoins des lecteurs du rapport de durabilité.
L’ANC distingue deux situations à considérer :
- Politiques, actions et cibles : obligation de transparence sur toutes les exigences de publication. Si l’entreprise n’a pas de politique ou action ou cible, l’entreprise devra le mentionner.
- Indicateurs : les informations demandées par une exigence de publication doivent être incluses dans le rapport de durabilité, si elles sont jugées matérielles.il est possible de ne pas publier certaines informations si elles ne sont pas jugées matérielles (à justifier en cas d’audit).
Sources : Guide de l'ANC 2024
Voilà, vous savez tout sur la matérialité ! A vous de jouer :-)
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