
Sophie Bridier
Mar 11, 2025
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La Commission européenne a présenté, le 26 février, deux textes visant à alléger l’obligation de reporting de durabilité. Une première proposition, dite « stop the clock », pourrait remettre à 2028 l’obligation de présenter un tel rapport pour les entreprises des vagues 2 et 3 (principalement les grandes entreprises qui n’ont pas publié de rapport en 2025 et les PME cotées). Une seconde proposition, plus fournie, devrait limiter et revoir en profondeur les obligations sur ce sujet qui concerneraient uniquement les grandes entreprises de plus de 1000 salariés. Passage en revue des potentiels apports des textes.
Sur les entreprises de l’UE tenues de présenter un rapport
« Réduire d'environ 80 % le nombre d'entreprises concernées par le reporting de durabilité », tel est l’objectif affiché par la Commission européenne. A partir de 2028 (sur l’exercice 2027), seraient ainsi uniquement concernées les grandes entreprises - et leurs sociétés mères - qui :
L’information de durabilité - ou état de durabilité - devrait toujours être produite au sein du rapport de gestion de l’entreprise.
Ce rapport serait toujours à réaliser à la suite d’une analyse de double matérialité. Ce principe resterait inscrit dans les textes légaux.
Les autres entreprises - des grandes entreprises de moins de 1000 employés, en passant par les ETI et les PME cotées - ne seraient plus concernées, de façon obligatoire, par le reporting de durabilité. Un standard volontaire, leur permettant de présenter un rapport si elles le souhaitent, serait néanmoins mis en place par la Commission européenne.
Jusqu’où remonter dans sa chaîne de valeur ?
Les grandes entreprises auraient toujours à aller chercher de l’information sur leur chaîne de valeur, y compris sur leurs relations d’affaires et leur chaîne d’approvisionnement. Cependant, concernant les entreprises plus petites - n’employant pas plus de 1000 salariés et qui ne seraient donc pas obligatoirement concernées par l’état de durabilité - il serait interdit de leur imposer une remontée d’informations allant au-delà du futur standard dit volontaire. Ceci est désormais écrit « noir sur blanc » dans l’un des textes du paquet omnibus. Une exception est toutefois prévue : le cas où les informations sollicitées sont communément partagées par l’ensemble des entreprises au sein d’un secteur d’activité.
Sur les entreprises de pays tiers
Concernant les entreprises de pays tiers, le calendrier n’évoluerait pas. Le rapport serait à produire en 2029 sur l’exercice 2028. Néanmoins les seuils, permettant de considérer l’entreprise comme soumise au rapport de durabilité, évolueraient. Ainsi, elles deviendraient concernées si elles :
L’entreprise de pays tiers, la filiale ou la succursale pourraient toujours réaliser concrètement l’état de durabilité.
Sur l’audit du rapport de durabilité
La Commission propose que les États membres s’assurent légalement que les audits des rapports n’aillent pas trop loin. Ainsi les auditeurs auront à faire respecter le principe suivant : les entreprises soumises au reporting de durabilité ne pourront pas demander à celles non concernées - au sein de leur chaîne de valeur - de leur faire remonter de l’information au-delà de ce que prévoira le futur standard sur le reporting volontaire. La certification des rapports devrait en tenir compte.
Les auditeurs auront à délivrer une assurance limitée de l’état de durabilité. Sur ce point, la Commission ambitionne de publier « des lignes directrices sur l’assurance ciblée d'ici 2026 », dans l’attente d’un standard décliné en la matière.
Sur le balisage XBRL
Une fois le paquet omnibus adopté, il serait désormais précisé que les entreprises auront à baliser leur rapport de durabilité au format XBRL uniquement à la suite de précisions apportées en la matière par un texte légal (un acte délégué). « Jusqu'à l'adoption de ces règles de balisage par le biais dudit règlement délégué, les entreprises ne seront pas tenues de baliser leurs rapports de durabilité », mentionne clairement le paquet omnibus.
Sur les standards
Concernant les standards européens sur le reporting de durabilité :
L’objectif est alors le suivant : « la révision de l'acte délégué réduira considérablement le nombre de points de données obligatoires des ESRS :
Sur l’analyse de double matérialité, « la révision (…) fournira des instructions plus claires sur la manière d'appliquer le principe de matérialité, afin de garantir que les entreprises ne communiquent que des informations matérielles ». L’objectif est aussi de « réduire le risque que les prestataires de services d'assurance encouragent par inadvertance les entreprises à communiquer des informations qui ne sont pas nécessaires ou à consacrer des ressources excessives au processus d'évaluation de la matérialité ».
La seconde mouture des ESRS « simplifiera [également] la structure et la présentation des normes. Elle améliorera encore le degré déjà très élevé d'interopérabilité avec les normes mondiales de reporting en matière de durabilité. Elle apportera également toute autre modification jugée nécessaire compte tenu de l'expérience acquise lors de la première application des normes ESRS ». Les travaux à mener semblent assez conséquents.
Prochaines étapes
Ces modifications entreront en vigueur une fois que les co-législateurs - le Parlement européen et le Conseil - se seront mis d'accord sur les textes et après publication au Journal officiel de l'UE. Ce qui prendra plusieurs mois. Les co-législateurs peuvent amender les propositions actuelles et parvenir à un texte de compromis qui apporte des évolutions sur l’ensemble du paquet omnibus.
L’objectif affiché par la Commission européenne est le suivant :
A ce jour, le droit qui reste en vigueur, et oblige ainsi les entreprises, demeure le texte de la directive CSRD tel que transposé dans les États membres de l’UE, comme en France ou en Belgique par exemple.